JFK L’assassinat les questions
Dallas 22 novembre 1963

Site dédié à l’assassinat du Président Kennedy et à l’étude des questions sans réponse pleinement satisfaisante près de 60 ans après les faits.

L’assassinat : hasard ou volonté délibérée

Analyse de la nature de l’attentat


par Pierre NAU

Certains événements de l’histoire restent gravés plus longtemps dans les consciences ou dans le subconscient collectif. L’assassinat du président Kennedy a provoqué un choc émotionnel considérable aux États-Unis. Je ne me souviens plus très bien s’il s’agit de Pierre Salinger le "Press Secretary" de John Fitzgerald Kennedy ou un de ses contemporains qui déclarait à l’époque que désormais tout un chacun se souviendrait à jamais de l’endroit où il se trouvait au moment où le Président a été assassiné. Cette phrase est révélatrice du traumatisme créé à l’époque parmi la population américaine et dans une moindre mesure à l’étranger.

1 Pur hasard ?

Le peuple américain voulait donc savoir ce qu’il s’était passé et comment on en été arrivé là. Ceci d’autant plus que les américains ont une confiance absolue dans leur système. Un tel acte remettait donc en cause les fondements de la règle démocratique et par suite de la constitution.
Pour satisfaire le besoin de savoir de la population, le nouveau président en exercice nomma donc la commission Warren désormais célèbre avec pour mission de faire toute la lumière sur cet attentat et de lui remettre rapidement ses conclusions. Bien évidemment tous les moyens d’investigations techniques et scientifiques étaient mis à la disposition de l’enquête et les services fédéraux FBI et Services secrets apportaient leur précieux concours à l’entreprise.
La principale contrainte imposée à la commission était le facteur temps. On ne peut donc pas complètement blâmer les autorités fédérales de lui avoir demandé de faire vite. Il n’était pas envisageable de procéder à une vaste enquête qui ne remette pas ses conclusions dans un délai raisonnable. Ainsi la commission Warren débuta son travail. On ne peut pas lui reprocher non plus de ne pas s’être totalement investi dans l’entreprise puisque un an après James Earl Warren remettait son rapport final au Président Lyndon Baines Johnson.
Ce dernier avait de quoi être satisfait car la commission lui apportait des conclusions claires de nature à rassurer le pays tout entier. L’assassinat avait été l’oeuvre d’un déséquilibré, en mal de reconnaissance de son entourage et qui plus est communiste, ce qui dans le contexte de l’époque était un défaut majeur.
L’opinion publique était ainsi rassurée et le système n’était pas remis en cause. En la personne d’Oswald on fournissait là l’exutoire idéal à une population particulièrement choquée et désireuse de connaître la vérité. L’affaire était bouclée. Des précautions complémentaires seraient désormais prises avant tout voyage présidentiel afin d’éviter qu’un tel drame ne se reproduise. L’amérique qui ne pouvait pas se permettre de rester dans le doute plus longtemps était satisfaite.

Toutefois, très rapidement, les belles certitudes allaient laisser la place au doute. A peine diffusé, le rapport est lu par des gens de tous horizons de la presse écrite, des avocats et par l’américain moyen. Très vite les premières critiques se font jour. L’avocat new-yorkais Mark Lane fait partie de ceux qui mettront très vite en évidence les limites et les carences du rapport Warren. Dès 1966, il publie un livre qui est une sorte de contre enquête où il met en évidence les points précis sur lesquelles la commission ne s’est pas suffisamment attardée. Il va même jusqu’à prétendre que deux américains sur trois ne croient plus aux conclusions du rapport Warren. Si nul ne sait sur quelles données statistiques se base Mark Lane pour émettre une telle affirmation, l’émoi est vif chez ceux qui se sont intéressés de prés à l’enquête. Il n’est pas certain qu’il en est été de même pour le citoyen américain. Contrairement aux affirmations de l’avocat, le public préférera longtemps rester sur les certitudes émises par le rapport Warren. Ce n’est qu’en 1978 qu’une commission parlementaire sera chargé de rouvrir le dossier sans que cette décision ne captive pour autant les foules. Le véritable détonateur viendra bien plus tard et par l’intermédiaire du cinéma avec la projection du film d’Oliver Stone : JFK. La véritable prise de conscience par le peuple date de 1993 l’année de sa diffusion. L’impact de ce film est considérable. Oliver Stone, dans ce long métrage, rend un hommage au procureur de la Nouvelle Orléans Jim Garrison, le seul à avoir mené une instruction débouchant sur des inculpations et un procès. Reprenant les thèses du procureur pour l’essentiel, le film est aussi l’occasion pour de nombreux spectateurs aux États-Unis de visionner pour la première fois les images de l’attentat prises par Abraham Zapruder à l’aide de sa caméra Bell de 8 mm. Le but de est atteint : l’Amérique profonde découvre qu’on ne lui a pas tout dit et que des zones d’ombres demeurent.

Pendant des années l’ensemble de l’Amérique a peut-être refusé d’ouvrir les yeux pour éviter de mettre à vif une blessure à peine cicatrisée et réveiller un mauvais souvenir. Peut-être qu’un traumatisme encore plus profond et qu’elle n’avait pas encore exorcisé la préoccupait davantage : la guerre du Viet-Nam. Au plus profond de lui même, le citoyen américain voulait encore croire que l’assassinat de John Fitzgerald Kennedy était un accident de l’histoire et rien d’autre. Cependant, on peut s’étonner de l’apathie profonde dans laquelle le pays se trouvait. Les assassinats de Matin Luter King et de Robert Francis Kennedy le frère du Président assassiné à 3 mois d’intervalle en 1968 auraient dû provoquer une prise de conscience. Mais encore une fois les enquêtes menées à la suite de ces 2 attentats concluaient à la thèse d’un tireur fou aux mobiles assez vagues.

Le hasard de l’histoire et les événements des trente dernières années ont donc contribué à maintenir l’Amérique profonde dans sa confiance en la version officielle rassurante que la commission Warren lui avait donné de l’assassinat de Dallas. L’américain en général plus que tout autre citoyen du monde a horreur du doute. En particulier si ce dernier est de nature à déstabiliser les institutions. Pour s’en convaincre, il suffit d’observer la crise de confiance générée par la guerre du Viet-Nam au sein de la population. Conscient de tout ceci, les hommes en charge de l’exécutif et les autorités du pays ne souhaitaient pas non plus réveiller un douloureux épisode de l’histoire intérieure américaine. Aussi, à dessein, ont ils maintenu pour vérité officielle coûte que coûte et jusqu’à aujourd’hui la conclusion de la commission Warren

2 Volonté délibérée ?

Outre les raisons évoquées plus haut, l’exécutif avait de bonnes raisons de ne pas rouvrir une enquête officielle, susceptible d’apporter des réponses aux questions légitimes posées par ceux qui ne se satisfaisaient pas du rapport Warren. Si cette démarche pouvait se comprendre tant que la guerre du Viet-Nam n’était pas terminée et que les américains n’avaient pas en partie exorcisé les conséquences psychologiques de cet épisode douloureux de leur histoire, vingt ans ou trente ans plus tard elle ne s’imposait plus. Après tout il était beaucoup plus difficile pour tous d’assumer l’échec Vietnamien, synonyme de première défaite militaire pour la première puissance mondiale, que l’assassinat d’un de leurs Présidents. Alors pourquoi cette continuité dans la démarche consistant à imposer absolument la thèse de la commission Warren. Pourquoi n’avoir pas saisi l’occasion offerte par les conclusions de la commission sénatoriale de 1978 qui, aussi maigres soient elles, représentaient malgré tout un réel progrès, 15 ans après l’attentat. Pour la première fois, à la lumière d’un élément nouveau en particulier, l’hypothèse d’un complot était émise officiellement par des élus. L’écoute d’un enregistrement audio de la radio embarquée d’une des motocyclettes d’un policier de l’escorte, permettait de dénombrer non pas 3 mais 4 coups de feu. Ce point intéressant et capital à la fois, remettait complètement en cause les conclusions de la commission Warren qui a toujours prétendu que seuls trois coups de feu avaient été tirés et par un seul homme Lee Harvey Oswald. Désormais une preuve matérielle venait conforter dans leurs idées les tenants de la thèse d’un complot. Oswald n’ayant pas pu tirer un un coup de feu supplémentaire (seules trois douilles avaient été retrouvées au dépôt de livres) un tireur supplémentaire l’avait aidé. Pourtant la commission sénatoriale sera d’une prudence extrême dans son rapport en se contentant d’indiquer qu’il existait une probabilité pour que l’attentat soit l’oeuvre d’un complot. Ce sera la dernière fois qu’une instance officielle sera mandatée pour enquêter sur l’assassinat de Dallas. Depuis plus rien jusqu’au film choc d’Oliver Stone. Là, les esprits américains se sont réveillés. Pour la première fois, à la vision de ce film, le spectateur avait le sentiment que tout n’avait pas été dit sur l’attentat. De plus les américains commençaient à porter un regard différent sur leurs institutions. L’affaire du Watergate aboutissant à la démission du Président Nixon, les opérations menées par la conduite de la CIA lors de l’exécution de certaines opérations, l’Irangate ont quelque peu ébranlé la confiance des américains dans leurs dirigeants et dans leurs institutions.

Dans ces conditions un épisode supplémentaire mettant en cause des carences de fonctionnement, des négligences voire pire des complicités dans l’appareil étatique ou ses services au moment de l’attentat de Dallas auraient provoqué à n’en pas douter un sérieux séisme psychologique dans tout le pays. Aussi la tentation de déposer aux Archives Nationales des éléments intéressants pour progresser dans la quête de la vérité était grande. C’est la solution retenue par le pouvoir. C’est regrettable et décevant pour un pays qui a su faire très rapidement l’exégèse du conflit Vietnamien. Beaucoup plus rapidement en tous cas que nous français vis à vis de ce que l’on appelle enfin et depuis peu de temps la guerre d’Algérie. 

Alors pourquoi l’assassinat de John Fitzgerald Kennedy le 22 novembre 1963 à Dallas reste-t-il un sujet tabou pour la classe politique et les institutions américaines ? Pourquoi l’Etat est-il si réticent à rendre publique des éléments intéressants de nature à faire progresser la vérité. Si les tenants de la thèse du complot ne sont que des affabulateurs et si l’Etat en détient la preuve pourquoi laisse-t-il libre cours à leur imagination et aux insinuations laissant entendre qu’il existe des complicités au plus au niveau de l’Etat dans cette affaire ? Sil détient les preuves du contraire, pourquoi ne pas en informer tout le monde. Mais peut-être n’a-t-il pas le choix et que les pièces consignées aux Archives Nationales vont dans le sens suggéré par la commission sénatoriale de 1978. Fouiller le passé n’est pas toujours une chose facile et bien souvent on invoque la raison d’Etat quand on ne veut pas s’y résoudre. L’histoire de France est pleine d’exemples dans ce domaine. N’avons nous pas en France encore du mal à exorciser l’époque de Vichy et de la collaboration 55 ans après. Les Etats-Unis n’échappent pas à la règle. Le poids de l’histoire est parfois trop lourd à porter. 

Il est vrai que la personnalité du Président Kennedy n’aide pas. A son époque et encore maintenant il exerce une réelle fascination. Même si quelque fois la légende a dépassé la réalité, il restera malgré tout à jamais le seul Président à avoir promis la lune à ses citoyens et réussi à tenir ce pari audacieux. Il est dommage que les balles d’un ou de plusieurs assassins à Dallas l’aient empêché de voir çà. De plus, dans la courte histoire des Etats-Unis, la famille Kennedy et le Président en particulier représentait et représente toujours d’une certaine façon la référence, à l’instar de la famille royale d’Angleterre avant qu’elle ne soit désacralisée à la suite de ses nombreux scandales internes. Plus que dans toute autre nation, l’américain s’identifie à son Président. Il n’est pas la personne inaccessible que l’on rencontre dans un pays comme chez nous où les présidents sont généralement issus d’une certaine élite ou caste politique. Il n’en est pas de même aux Etas-Unis où tout le monde peut espérer devenir Président et avoir des chances réelles d’y arriver. Il n’existe pas de filière particulière et les élections d’un passé récent ont vu un héros de la dernière guerre mondiale, un marchand de cacahuètes et un acteur de cinéma accéder à la magistrature suprême. Le Président Kennedy avait quelque chose de plus. Il fascinait et il faisait rêver. Il avait un projet d’avenir et une hauteur de vue qui lui permettait de se projeter dans l’avenir. Son idée de "Nouvelle frontière" était déjà à l’époque la préfiguration la mondialisation qui prévaut actuellement. Sa conception de l’intégration raciale et les lois qui en découleront et que mettra en oeuvre son successeur, complétaient au plan intérieur la hardiesse de son programme. Au risque de ne pas plaire à tout le monde bien évidemment. 

John Fitzgerald Kennedy était et demeure un symbole. Adulé de son vivant, sacralisé au moment de sa disparition et quelque peu démystifié depuis (les mythes résistent mal à l’érosion du temps), son charisme était grand et son rayonnement reste 40 ans après sa mort très important. Aussi le peuple américain s’est-il senti désespérément seul et privé d’un président dont il était fier et qui avait de grands desseins pour son pays. Dans ces conditions sa disparition brutale en pleine gloire a été d’autant plus mal ressenti. Dans le conscient collectif seul un fou, un déséquilibré ou un communiste pouvait mettre fin à cette belle histoire. On comprend alors pourquoi les gouvernements successifs se sont bien gardés ou ont tout au moins éviter de réactualiser un dossier qui pouvait devenir explosif. En particulier si l’existence d’un complot était confirmée. 

3 Epilogue 

Il faut laisser du temps au temps disait un homme politique français. Le drame de Dealey Plaza est peut-être encore trop proche et le peuple américain insuffisamment préparé à admettre une vérité qu’il redoute. La génération des hommes politiques actuels est sûrement encore trop contemporaine de celle qui était au pouvoir dans les années soixante pour prendre le risque de secouer le pays et déstabiliser les institutions. Mais la vérité finit toujours par triompher. C’est une question de temps. Il appartient au peuple américain d’en hâter le processus s’il le désire et s’il est suffisamment préparé. Une chose est étonnante malgré tout. La famille Kennedy ne s’est semble-t-il jamais prononcée sur le sujet ? Pourquoi ? Lui a-t-on seulement posé la question ? Robert Francis Kennedy aurait-il rouvert l’enquête si il avait été élu ? On ne saura jamais. A moins que Sirhan-Sirhan ait une petite idée sur le sujet. Mais là se termine l’examen des faits et par convention on se gardera bien d’émettre des suppositions purement spéculatives.


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